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Favoriser la régulation des pucerons par la gestion de l’enherbement - retour d'expérience (Jean-Louis Bouysset - Aglae)

De Triple Performance
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Vergers Velleron - pommiers 3.jpg

Retour d’expérience d’agriculteur, qualifié par un groupe d’expert dans le cadre du projet Aglae porté par la Chambre d’Agriculture d’Occitanie.

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Retour d'expérience de Jean-Louis Bouysset, dans le cadre du projet Aglae. Il nous explique comment il favorise la régulation des pucerons par la gestion de l'enherbement de ses vergers.


Jean-Louis Bouysset exploite 32 ha de vergers à Lizac en Tarn-et-Garonne (vallée du Tarn) parmi lesquels on retrouve 27 ha de pommes (12 ha en agriculture biologique) et 5 ha de kiwi en agriculture biologique.


Son objectif est de produire le plus naturellement possible en accord avec le cahier des charges AB. Il ne possède que des variétés résistantes ou tolérantes à la tavelure, évite tout travail du sol y compris labour et travail profond avant plantation pour en préserver la vie et la structure, et gère l’enherbement de ses vergers de façon à favoriser au maximum la régulation par la faune auxiliaire des ravageurs et en particulier du puceron cendré.

Caractéristiques techniques

Convaincu de l’intérêt d’une flore variée dans le verger, Jean-Louis a essayé différents types d’enherbement (moutarde blanche, fétuque classique, jachère fleurie, enherbement spontané…). Son objectif est « d’avoir des fleurs sur toute la saison et le plus longtemps possible ». Pour lui, « toute introduction de diversité est bénéfique » et « il n’y a pas de mauvaises herbes, même les plantes avec de grosses racines pivot ont un impact bénéfique sur l’aération du sol ». Il accepte un fort salissement sur le rang hormis lierre et liseron, ainsi que sur l’inter-rang.


L’enherbement est entretenu au minimum pour avoir des fleurs sur la plus longue période possible :

  • 1 à 2 passages de tonte à fil intercep sur le rang
  • 1 à 2 fauches sur l’inter-rang si la présence des graminées est trop importante.
  • Pas de fauche trop fréquente qui, au contraire, favorise les graminées.
  • Il laisse toujours «15 à 20 cm » afin que l’enherbement reste un abri pour les auxiliaires.
  • L’inter-rang est roulé pour ne pas gêner le personnel à la récolte.
  • Un passage de broyeur pour les feuilles et le bois de taille est effectué en fin d’hiver.
  • Pour préserver la jachère, les traitements contre le puceron cendré ont été effectués à hauteur d'un rang sur deux cette année.

Retour d'expérience

Après 10 ans de mise en pratique, Jean-Louis est satisfait de la gestion de l’enherbement dans ses parcelles bio, et plus particulièrement de la régulation du puceron cendré, ravageur le plus problématique pour ses cultures. Ce dernier est même mieux régulé sur ses parcelles bio que conventionnelles.


A l’avenir, il pense privilégier des enherbements spontanés, et favoriser leur diversité en limitant les fauchages, y compris dans ses parcelles en conventionnel. Ces pratiques d’enherbement de l’inter-rang sont cependant plus adaptées à des vergers adultes qu’à des vergers jeunes, pour des problèmes de concurrence et de traumatisme sur jeunes arbres liés au passage des outils.


Jean Louis envisage également de repenser sa fertilisation sur l’atelier AB en l’apportant dans l’irrigation, pour mieux l’adapter à l’évolution de la flore et à la concurrence qu’elle peut engendrer : apport d’automne moins concurrentiel et meilleure localisation…

En détail

Circuit commercial

  • Adhérent à la coopérative Stanor (groupe Blue Whale)
  • 400 tonnes de pommes AB, 600 tonnes de pommes conventionnelles et 20 tonnes de kiwis (en 2019)

Contexte physique

  • Climat de type océanique dégradé, avec des hivers doux et humides et des étés chauds et secs. Deux épisodes de canicule ont eu lieu durant l’été 2019.
  • Sols dominants : alluvions limono sablo- argileuses
  • Environnement riche en bosquets, haies, du bord du Tarn ; grande diversité d’habitats intéressants pour la faune locale.

Historique

Jean-Louis Bouysset s’installe en 1983 en agriculture conventionnelle sur 6 ha de pommiers et 4 ha de kiwi.


La conversion en AB débute en 2004 avec les kiwis et est effective en 2005. En 2019, l’exploitation s’agrandit (reprise de fermages) pour arriver à une trentaine d’hectares de vergers.

Zoom sur l’atelier de production

  • 12 ha de pommiers en Agriculture biologique, Variétés résistantes à la tavelure (Ariane, Fujion, Story, Ladina, Regalyou) ou tolérantes à la tavelure (Evelina, Canada)
  • Conduite en axe vertical (3.70 à 4m entre rangs et 0.70 à 1m entre arbres)
  • Irrigation en goutte à goutte
  • Filets para grêle
  • Ages des vergers : de 2 à 13 ans
  • Parcellaire plutôt regroupé

Stratégies de gestion

Objectifs généraux

  • N’avoir que des variétés résistantes ou tolérantes à la tavelure
  • Produire de façon la plus naturelle possible

Objectifs globaux de l’atelier de production

  • Produire 40T/ha en moyenne
  • Produire le plus naturellement possible en accord avec le cahier des charges AB
  • Pas de travail du sol
  • Limiter les interventions (le temps passé sur le tracteur…)

Objectifs agronomiques

  • Favoriser au maximum la régulation des ravageurs (pucerons) par la faune auxiliaire :
    • Enherbement spontané ou semé de l’inter-rang pour favoriser la biodiversité
    • Limitation des tontes et broyages pour avoir des fleurs sur la plus longue période possible
    • Jamais de fauche rase (mini 15 à 20 cm)
    • Fauche limitée pour ne pas favoriser les graminées
  • Préserver la vie et la structure du sol :
    • Pas de travail du sol
    • Enherbement du rang et de l’inter-rang pour améliorer la structure du sol
    • Pas de labour ni de travail du sol profond avant plantation
Jean-Louis Bouysset ITK.png

Niveau d'acceptation

Laiche paniculée.jpg

Sur le rang :

  • Accepte un fort salissement mais pas de lierre ou de liseron

Sur l’inter-rang :

  • Idem, présence de gros pied de laiche paniculée sur certaines parcelles
  • Roule l’inter-rang pour ne pas gêner le personnel lors de la récolte

Mise en œuvre opérationnelle pour atteindre mes objectifs

Jean-Louis a l’expérience du bio depuis 2010, avec aujourd’hui presque 40% de la surface de son exploitation en AB.

Pour lui, laisser l’enherbement à « une utilité pour les ravageurs et le sol ». D’ailleurs, depuis cette année, il n’utilise plus aucun herbicide en conventionnel (sauf 1 passage exceptionnel sur jeunes plantations).

Sa priorité est la « régulation des ravageurs », et notamment le puceron cendré qui pose de gros problèmes. « Nos auxiliaires ne partent pas du champ à la fin de la saison pour y revenir au printemps », il cherche donc à pérenniser ceux-ci au sein des parcelles par le biais de l’enherbement quasi-permanent, et favoriser ainsi la régulation du puceron par la faune auxiliaire. Mais la préservation du sol est aussi une de ses motivations ; « moins tu touches le sol, mieux c’est» et il n’a « pas envie de travailler le sol ».

Jean Louis est convaincu de l’intérêt d’une flore variée dans le verger et ces dernières années il a essayé différents types d’enherbement ;

  • Un semis de moutarde blanche sur l’ensemble de la parcelle avant la plantation, mais un épisode de gel la 2nde année ne l’a pas incité à poursuivre dans cette voie.
  • Un semis de fétuque classique a été réalisé en 2012 sur une parcelle d’Opale, Dalinette et Crimson avec très peu de fauchages par la suite pour favoriser les dicots.
  • Un semis d’une jachère fleurie il y a 2 ans, 1 rang sur 2, qui s’est ressemé toute seule depuis, « d’où l’intérêt de laisser les fleurs monter à graines et d’attendre le plus longtemps possible avant de rouler » la jachère.
  • Un enherbement naturel, sur la parcelle de Regalyou planté cette année, il a « laissé pousser la flore naturelle et couche le tout après le retour du cendré ».


Ces différents enherbements ont tous pour objectifs « d’avoir des fleurs sur toute la saison et le plus longtemps possible ». Il « revoit même des marguerites qui refleurissent alors qu’elles avaient disparu ». Pour lui, « toute introduction de diversité est bénéfique » et « il n’y a pas de mauvaises herbes, même les plantes avec de grosses racines pivot ont un impact bénéfique sur l’aération du sol ».


Cette année, il n’a pas apporté de fumure, et il ne cherche pas particulièrement compenser la concurrence de l’enherbement car « il veut produire bio ». Il reprend régulièrement les analyses de sol de ses différentes parcelles, et s’il y a des carences il les corrige par l’application d’engrais foliaire avec oligoéléments.

Jean-Louis Bouysset Enherbement.jpg


L’enherbement semé ou spontané est entretenu au minimum ; 1 à 2 passages d’Herbanet sur le rang (1 en début de saison et 1 après récolte), et 1 à 2 fauches sur l’inter-rang si la présence des graminées est trop importante (mais attention à ne pas faucher fréquemment, sinon au contraire on favorise celles-ci). Cependant, le passage de l’Herbanet est chronophage (4 heures/ha) ; « c’est pour ça que je ne le fais pas souvent ».


Un passage d’Herbanet attelé devant le tracteur combiné à une fauche (à l’arrière) passant au plus près des arbres est réalisé en fin de saison. Cependant, il n’effectue « jamais de fauche rase », et laisse toujours «15 à 20 cm » afin que l’enherbement reste un abri pour les auxiliaires. Un passage de broyeur pour les feuilles et le bois de taille en fin d’hiver est effectué.


Pour préserver la jachère, les traitements contre le puceron cendré ont été effectués 1 rang/ 2 cette année.


Il « ne sait pas trop » s’il va transposer cette technique d’enherbement au conventionnel, mais s’il le fait, ce sera « plutôt de la flore spontanée ».


Il « arrive à de très bons résultats » grâce à l’enherbement de l’inter-rang.


Il reconnaît que ces pratiques d’enherbement de l’inter- rang sont plus adaptées à des vergers adultes qu’a des vergers jeunes, car « la concurrence [peut-être] marquée » avec l’enherbement lors des premières années. Et attention au passage de l’Herbanet sur jeunes plantations qui peut être traumatisante pour les arbres.

Focus matériels

Herbanet montée à l’avant du tracteur

Herbanet
  • Les fils en nylon vont détruire l’enherbement par lacération sans travail du sol
  • Travail d’un seul côté
  • Vitesse d’avancement entre 2 et 2.4 km/h, soit 4 heures/ha

Avantages :

  • Bon marché
  • Solide
  • Simple

Inconvénients :

  • 30 à 40 min pour changer les fils tous les 1.5/2 ha
  • mauvais travail sur graminées mais bon travail sur dicot attention aux jeunes plantations

Faucheuse Perfect

Faucheuse Perfect
  • Tondeuse avec deux ailettes qui peuvent se replier et s’écarter, montée à l’arrière du tracteur (combinaison possible avec l’Herbanet à l’avant)
  • Largeur de travail de 1.9 à 3.2 m
  • Vitesse d’avancement : 5km/h, soit 0.5h/ha

Avantages :

  • Repli possible d’un côté : pratique pour le transport et permet de passer le plus près des arbres

Rouleau cultipacker

Rouleau cultipacker
  • Monté à l’arrière du tracteur
  • Constitué de rouleaux en métal eux-mêmes disposant de disques montés indépendamment

Avantages :

  • Couche et donc ne favorise pas les graminées, permet de re semer la jachère

Indicateurs

Rotor avec fils en nylon Tondeuse
Marque des outils Herbanet Faucheuse Perfect
Coûts d’investissement 8 000 € 11 000 €
Coûts de fonctionnement Changement des fils assez fréquent
Vitesse(s) d’avancement 2-2.4km/h 5km/h
Nombre de passages (approche bilan carbone) 1 à 2 1 à 2
Temps de travaux (h/ha) 4 par passage 0.5 par passage

Niveau de satisfaction du producteur

Jean-Louis Bouysset

Jean Louis «travaille en bio depuis 10 ans », ce qui lui permet d’avoir un réel recul sur la situation

Points positifs :

  • Satisfait de la gestion de l’enherbement dans ses parcelles bio et surtout de l’impact de celles-ci sur la régulation du puceron cendré, ravageur le plus problématique chez lui : « très encourageant »
  • « Très peu de petits fruits[1] dans le bio alors qu’il y en a énormément en conventionnel », lié à la gestion de l’enherbement
  • Pas un foyer sur certaines parcelles AB, alors que les variétés sont parfois sensibles (Ariane…)
  • Testé plusieurs types d’enherbement sur plus de 8 variétés différentes


Points négatifs :

  • « Je ne sais pas si l’année prochaine j’aurais les mêmes résultats »
  • Conscient que sa stratégie de gestion de l’enherbement est plus adaptée à des vergers adultes qu’à des jeunes vergers ; « ça tombe bien car sur les prochaines années, je ne pense pas replanter mais surgreffer les parcelles conventionnelles en variétés RT »

Perspectives

Après avoir essayé différents types de semis, Jean Louis pense plutôt à l’avenir favoriser des enherbements spontanés, et favoriser leur diversité en limitant les fauchages.


Suite aux gros problèmes de puceron cendré sur ses parcelles en conventionnel (en absence de traitement aphicide avant fleur), il réfléchit à laisser l’enherbement spontané se développer pour attirer les auxiliaires.


Jean Louis envisage également de repenser sa fertilisation en l’apportant dans l’irrigation sur l’atelier AB pour mieux l’adapter à l’évolution de la flore et à la concurrence qu’elle peut engendrer: apport d’automne moins concurrentiel et meilleure localisation…

Indice de recul sur la stratégie

Indice de recul sur la stratégie : 3


Auteur de la fiche : Chambre Régionale d’Agriculture d’Occitanie.

Date d'édition : Septembre 2019.

Annexes et liens


Leviers évoqués dans ce système

Matériel évoqué dans ce retour d'expérience

Cultures évoquées

Bioagresseurs évoqués dans ce retour d'expérience

  1. Petits fruits : fruits pygmées suite à des attaques de puceron cendré
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