Faire face au froid et aux gelées tardives (impacts et solutions préventives)
Comprendre l'impact du froid sur les plantes et les solutions préventives à mettre en place.
Le gel
Pour se protéger la plante expulse l’eau de ses cellules vers les espaces inter-cellulaires et augmente la concentration de l’eau en sels et en sucres. Quand cela ne suffit plus, les cellules gèlent, les fonctions biologiques s’arrêtent et les cellules éclatent. La plante ou l’organe en question meurt.
Facteurs de risque
En biologie végétale, il existe une température minimale (appelée température « critique ») qui doit être atteinte pour qu'une culture subisse des blessures, et dans le cas extrême, sa mort. Cette température est différente selon les végétaux et dépend de nombreux facteurs comme :
- L’espèce et la variété ;
- Le stade physiologique ou végétatif ;
- La vigueur de la plante ; L’état du sol et la nature de la couverture végétale ;
- L’intensité et durée du gel : les températures critiques (« seuil de congélation ») nécessaires à l'apparition de dommages varient en fonction du temps pendant lequel elles demeurent au-dessous du seuil. Par exemple, les bourgeons des arbres fruitiers peuvent être lésés par une température de -2 °C persistant plus de 24 heures, mais peuvent survivre s'ils sont exposés à une température de -6 °C pendant moins de 2 heures. Cela explique pourquoi la température critique d'une gelée de rayonnement ne sévissant que quelques heures en début de matinée peut être plus basse que celle d'une gelée d'advection qui peut se prolonger dans la journée.
- La présence de nuages et/ou de vent pendant le gel ;
- Les conditions climatiques durant la phase de dégel.
- Le stade phonologique : Plus le stade phénologique de la plante sera avancé (proche de la maturité), plus le risque sera grand.
- La santé de la plante : Une plante en bonne santé résiste souvent mieux au gel.
- Les interventions culturales qui précèdent.
Types de gel
On parle de journée de gel lorsque la température n’est pas supérieure à 0°C et de gelée lors du contraire. La gelée peut être meurtrière si les températures provoquent des dégâts sur les végétaux.
On fait la distinction entre gel d'advection et gel de rayonnement selon les conditions atmosphériques qui en sont la cause :
- Le gel d'advection est provoqué par le passage d'une masse d'air froid venue d'une autre région, quand les vents sont relativement forts.
- Le gel de rayonnement (ou gelée blanche) se produit seulement de façon localisée et par nuit claire et calme.
Interventions culturales
Si l’itinéraire culturale amène la plante à concentrer de l’eau dans ses cellules, un épisode de gel qui suit cette intervention culturale va entraîner plus de dommages.
C'est le cas avec :
- L’apport d’un engrais basé sur les nitrates notamment. Leur forte concentration ponctuelle nécessite chez la plante, pour dénitrifier la molécule de nitrate, l’absorption d’une grande quantité d’eau.
- Une application de produits phytosanitaires qui entraîne un phénomène de détoxification chez la plante qui va induire l’utilisation d’une plus grande quantité d’eau dans ses cellules, comme nous pouvons boire beaucoup « pour nettoyer » notre corps.
Les effets du froid
Effet déshydratant du froid
Les températures froides dans le sol induisent une diminution de la disponibilité de l’eau pour la plante et peuvent conduire à une déshydratation de celle-ci. Au lieu de circuler du sol vers les racines, l’eau circule des racines vers le sol, par le mécanisme d’osmose. De cette façon, la plante ne peut plus absorber d’éléments minéraux, cela cause des carences induites.
Pour lutter contre ce phénomène, certaines plantes s’adaptent en augmentant la concentration de leur sève en sucre ou en minéraux.
Les mycorhizes ne fonctionnent plus
Les mycorhizes n’aiment pas beaucoup le froid et pour une fois ne semblent pas avoir un rôle important dans la lutte contre le froid pour la plante. Les plantes arctiques ne sont d’ailleurs pas mycorhizées. Quand les températures diminuent, elles ne participent plus à la nutrition de la plante. Une étude menée en Norvège comparant des plantes qui poussent à 8°C ou à 15°C avec ou sans mycorhizes montre que les plantes mycorhizées n’ont plus beaucoup d’avantages à 8°C par rapport aux plantes non mycorhizées.
L’activité hormonale
La plante ne peut pas se déplacer pour lutter contre un stress dans son environnement. Les hormones sont son principal mécanisme d'adaptation qui lui permet de réagir à l’attaque d’un bioagresseur ou bien au froid. La symbiose de la plante avec des bactéries de la rhizosphère augmente la sécrétion d’hormones. Des études sur le haricot vert exposant la plante à des températures entre -2 et -16°C montrent que le haricot vert est moins endommagé dans le gel si il est inoculé avec du rhizobium que sans inoculum.
Avant le gel, améliorer la résistance de la plante
Selon la culture
La faculté de la plante à résister au gel est en partie déterminée génétiquement et un maïs ne sera jamais aussi résistant au gel qu’un colza.
De la même façon, le stade de la culture est importante pour la sensibilité de la culture pour des raisons hormonales et de concentration de la sève.
La première action est évidemment d’adapter le choix des cultures, des génétiques et des précocités pour contourner le problème. Mais cette action est déjà utilisée par la plupart des agriculteurs et ne suffit pas.
Sensibilité en fonction de la sève
Moins il y a d’eau dans une plante, plus la concentration en sels minéraux et en sucres dans les cellules de la plante est élevée. C’est exactement ce qui se passe sur 70 % du globe terrestre car contrairement à l’eau douce, qui gèle à 0°C, l’eau de mer, doit descendre plus ou moins en-dessous de cette température en fonction de la concentration en sel. Une eau avec une concentration en sel de 10 % gèle à -7°C.
- La sève va geler à une température plus basse s'il y a une augmentation de la teneur en glucides et de la concentration en certains ions comme comme le potassium, le chlore, le sodium ou le magnésium (pouvant aller jusqu’à 3 degrés d’abaissement de température). Le but ici est d’apporter à la plante des électrolytes par pulvérisation foliaire avant la gelée, d'apporter du potassium, du magnésium ou de fortes quantités d'oligo-éléments (cuivre, bore ou de cobalt).
- Les niveaux élevés d'oligo-éléments, en particulier le manganèse, le bore, le zinc, le cuivre, le fer et le cobalt, pourraient permettre une meilleure résistance des plantes à des gelées plus fortes, et ceci dans les jours ou les heures qui suivent l'application. Les pulvérisations d'algues marines ont également cet effet. Les bétaïnes (acides aminés) contenues dans les algues marines notamment joueraient ce rôle dans la résistance des plantes au gel. Une pulvérisation d’urée foliaire additionnelle pourrait baisser le point hygroscopique gelée de quelques degrés. Une application foliaire d'éléments nutritifs manquants et de sucre en prévision d'un épisode de gel peut donc s'effectuer tout en veillant à ne pas favoriser un apport de minéraux dont la plante n'aurait pas besoin. Dans ce cadre, la connaissance de l'état nutritif de la plante via une analyse de sève permet de limiter le risque.
- De la même manière, un travail en préventif pour améliorer la santé de la plante et optimiser la photosynthèse permet d’augmenter la teneur en sucre de la plante et de descendre la température limite de gel de quelques degrés.
Ainsi, la résistance des plantes au gel est influencée aussi par la nutrition de la plante (la concentration en éléments minéraux dans la sève).
Après le gel, les solutions curatives
En post-gelées et pour rebooster une plante qui a subi un stress, un mélange d’acides aminés, de mélasse et d’algues ou encore des macérations de plantes permettent d’apporter à la plante stressée les moyens de se relever de la période de gel subit. Les acides aminés sont connus pour posséder une grande efficacité nutritionnelle et des propriétés intéressantes en tant que bio-stimulants. Ils augmentent l’assimilation des nutriments et notamment des oligo-éléments, favorisent le développement des micro-organismes et stimulent la résistance aux stress abiotiques comme le gel.
Le mélange suivant par exemple peut être appliqué après l'épisode de gelées dans l'optique de favoriser un redémarrage des cultures serait :
- 2 L/ha d’acides aminés ;
- 1 L/ha d’algue ;
- 100 g/ha de manganèse (soit 1 L/ha en liquide ou 0,5 kg/ha en poudre) ;
- 30 g/ha d’acide citrique ;
- 0,5 L/ha de mélasse (préférer la mélasse de canne car elle possède une proportion plus importante de sucres réduits).
Sources
Froid, gelées tardives quels impacts pour la plante et quelles solutions préventives, AgroLeague
Gelées tardives & cultures, AgroLeague
Annexes