Le Switchgrass ou panic érigé (Panicum virgatum L.) est une graminée herbacée pérenne caractérisée par son importante production de biomasse, par sa rusticité, par sa gestion efficace des ressources en eau du sol et par sa capacité à protéger les sols contre l’érosion. Le panic érigé est utilisé principalement dans la production de fourrages et comme élément servant à la méthanisation, mais présente des bénéfices au niveau agronomique tels que booster la vie du sol, capter l'azote, améliorer la porosité et la densité du sol.
Physiologie
Le switchgrass est une graminée herbacée provenant de l’Amérique du Nord et de l’Amérique Centrale, adaptée à un climat continental chaud. Il fait partie de la famille des plantes en C4 (comme le maïs et le sorgho) qui ont un besoin en chaleur plus important que la plupart des plantes cultivées pour se développer (optimum de température aux alentours de 35°C).
En fonction des variétés, il peut atteindre une hauteur sur pied comprise entre 1 et 2,5 m. Son système racinaire est composé de rhizomes qui peuvent atteindre une profondeur de 3,30 m, ce qui pourrait expliquer sa capacité à utiliser efficacement les éléments nutritifs du sol. Sa large couverture racinaire et sa propriété de sécrétion d’exsudats collants améliore la structure des sols dans lesquels il se développe et freine ainsi l’érosion des sols.
Description
- Port, hauteur et racines : Grandes tiges dressées de 1 à 2,5 mètres, longs rhizomes écailleux.
- Gaine de feuilles : Ronde, glabre et rouge violacée à la base. La plantule du panic érigé peut ressembler à celle des mauvaises herbes de type graminées comme les sétaires, digitaires et pied-de-coq. Elle se distingue par sa tige rougeâtre à la base et enroulée sur elle-même avant son déploiement. Les graminées annuelles auront plutôt une tige vert pâle (rouge clair dans le cas du pied-de-coq) un peu plus large et plate :
- Ligule : Membraneuse, 1,5-3,5 mm de long, velue.
- Limbe de la feuille : Plat, allongé, 6-12 mm de large, veiné.
- Inflorescence : Panicule ouverte, 15-55 cm de long.
- Epillets : Multiples, portés sur de longues ramifications.
- Semences : Ovale, petite, environ 500 000 grains/kg.
Avantages et limites
Avantages
- Potentiel de productivité important :
- En fin d'hiver en situation favorable, dès la 2ème année : 10 à 20 t MS/ha et en situation limitante : 7 à 12 t MS/ha.
- En cours d'automne en situation favorable : 15 à 25 t MS/ha et en situation limitante : 10 à 20 t MS/ha[1].
- Bonne adaptation à une très large gamme de sols et de climats.
- Peu exigeante au niveau du pH (5.5 à 7.5).
- Culture pérenne (30 à 40 ans).
- Bonne tolérance à la sécheresse.
- Besoins en fertilisation modérés.
- Peu de protection phytosanitaire.
- Pas de matériel spécifique pour le semis et la récolte.
- Peu d’interventions sur la culture en pleine production.
- Présence d’un couvert au cours de l’hiver[2][3] .
Limites
- Implantation délicate (difficultés de germination et de levée).
- Forte sensibilité à la concurrence des adventices en 1ère et 2ème années pendant lesquelles il faut bien désherber.
- Selon les variétés, il peut être sensible aux fortes gelées en hiver et au printemps.
- Entrée en pleine production dès la 2ème ou 3ème année suivant l’implantation.
- Nécessité d’une bonne portance de la parcelle pour la récolte en fin d’hiver.
- Masse volumique faible du produit en vrac.
- Destruction et remise en état de la parcelle à prévoir en fin de culture[2][3] .
Valorisation
Le panic érigé est une espèce intéressante pour sa production importante de biomasse et les propriétés structurantes et la résilience de son système racinaire. Sa culture offre plusieurs débouchés :
Fourrage sec
Contrairement à la plupart des graminées le switchgrass se récolte en sec en juin, ce qui facilite l’approvisionnement en fourrage durant l’été. Avec des apports nutritifs similaires au foin et une plus grande facilité de stockage, le panic érigé est une alternative au fourrage classique.
Fourrage sur pieds
La culture de panic érigé est adéquate pour la pratique du fourrage sur pieds (récolte du fourrage en hiver avant la montée en graine afin que les nutriments soient conservés dans les tiges) ce qui en fait une nouvelle source de fourrages verts en période hivernale.
Litière
Grâce à sa bonne capacité d’absorption des fluides, le panic érigé est un bon composant pour le paillage de l’atelier élevage. Pour visionner des retours d'expérience sur le sujet, nous vous invitons à consulter cette page.
Energie
- Méthanisation : Par sa pérennité et sa production importante de biomasse (à l’année n+2), le switchgrass est un composant durable pour le méthaniseur. A cette fin, il est récolté "en vert" à l'automne.
- Combustion : Récolte "en sec" en sortie hiver.
- Biocarburant de 2ème génération.
Cette culture peut être déclarée à la PAC en culture énergétique, mais attention cette culture pérenne (CP) est gérée comme une terre arable (TA) au niveau de la catégorie écorégime[4].
Bénéfices agronomiques et environnementaux
Azote
De faibles pertes de nitrate en phase de production sont observées, grâce à de faibles apports et à une bonne valorisation de l’azote du sol par la culture. Les observations réalisées sur le réseau LIGNOGUIDE montrent en effet des reliquats d’azote à l’automne assez faibles. Du fait du développement réduit de la culture en première année, les pertes pourraient être plus élevées la ou les premières années suivant l’installation, mais on ne dispose pas actuellement de référence pour les quantifier.
IFT
La conduite du switchgrass comporte peu d’intrants phytosanitaires après la phase d’implantation. L’Indice de Fréquence de Traitement (IFT) et le potentiel de transfert des matières actives vers les eaux de profondeur mettent en avant une pression particulièrement faible avec notamment un IFT moyen de 0.2 sur un cycle de 15 ans de culture de switchgrass (calculs réalisés à partir des itinéraires techniques type élaborés dans LIGNOGUIDE[5]).
Production et consommation d’énergie
La production du switchgrass consomme peu d’énergie, en raison d’une moindre fertilisation, de l’absence de travail du sol annuel et de l’amortissement des opérations d’implantation et de destruction sur l’ensemble de la durée de vie de la culture. La consommation en carburant représente près de 40% des consommations d’énergie (essentiellement pour la récolte). La production d’énergie est nettement supérieure à cette consommation.
GES
Les émissions de gaz à effet de serre (GES) au cours de l’étape de production de biomasse sont fortement liées aux intrants fossiles utilisés et en particulier à la fertilisation azotée. Grâce à ses besoins réduits en intrants azotés, le switchgrass a ainsi de faibles niveaux d’émission de GES par hectare (inférieurs à 1 000 kg eq. CO2 /ha[5]).
Stockage carbone
La culture de switchgrass pourrait permettre d’augmenter le stockage de carbone dans les sols de par sa forte production de biomasse. La prise en compte de ce stockage devrait encore améliorer le bilan GES.
Erosion
La couverture du sol que le switchgrass fournit et son réseau racinaire dense et profond permettent de protéger le sol de l'érosion par un effet mécanique. Mais il a également une action au niveau physico-chimique grâce à la production d'exsudats racinaires collants qui transforment la structure du sol et le rendent plus résistant.
Conduite de la culture
- Choix de la variété :
- Dans les régions à tendances froides, on préfèrera des variétés dites "upland" venant des régions nord des grandes plaines Américaines, à cycle de maturité court.
- Dans des régions plus réchauffées ou dans des sols se réchauffant plus vite, on préfèrera des variétés dites "lowland" du sud des USA, à cycle de maturité plus long.
- Préparation du sol : Réaliser une préparation du sol comparable au semis de prairie : sol fin et rappuyé en surface, sans discontinuité en profondeur. Il est fortement conseillé d'effectuer plusieurs faux-semis avant la mise place de cette culture afin de limiter la concurrence des adventices lors de la levée du switchgrass. Ceci permet de limiter l'usage des produits chimiques de désherbages.
- Semis[6] : Avril – mi-juin. Le semis à la volée est à proscrire. Utiliser un semoir à céréales à disque de préférence. Si la graine reste à la surface du sol, exposée à la lumière, elle ne germera pas car elle est photosensible. Bien rappuyer le sol avant et après le semis avec un rouleau lourd type Cambridge, afin que le contact graine / sol soit parfait.
- Profondeur de semis : Comme toute fourragère, maximum x 10 la grosseur de la graine. Exemple : pour une graine d'1 mm d'épaisseur, semer à 10 mm de profondeur. Le semis est réalisé à faible profondeur entre 0.5 et 1 cm, avec un semoir à céréales classique suivi d’un roulage.
- Température de germination : T° dans le sol > 14°C (Tournesol T°>8°C). L’humidité du sol doit être encore suffisante. Le choix de la date de semis doit donc être raisonné en fonction du lieu en tenant compte de ces deux contraintes. En condition très sèche, une irrigation peut permettre de favoriser une levée rapide.
- Densité : 10 à 12 kg/ha (objectif 10 – 20 pieds/m²) avec un semoir traditionnel.
- Fertilisation : Aucune fertilisation n’est nécessaire la première et la deuxième année après le semis. Les besoins de la culture sont faibles, et une fertilisation azotée l’année du semis favoriserait plutôt le développement des adventices. En objectif récolte biomasse :
- N : 50 U/ha d'azote. Un excès provoquerait la verse.
- P, K : 70 U/ha pour des rendements de 10 à 15t/ha.
Attention : Selon la destination finale du produit pour le chauffage toute fertilisation augmentera le taux de cendre.
- Désherbage : La seule étape à ne pas négliger est le désherbage les deux premières années. L'année du semis les sujets poussent de 30 à 80 cm de haut. Il est conseillé de passer le broyeur dans le switchgrass la première année, afin de faire un paillis et ainsi limiter la pousse d'adventices. Plusieurs désherbages sont parfois nécessaires. Compte tenu du faible écartement entre rangs le désherbage mécanique est difficilement envisageable.
- Irrigation : Une irrigation peut être envisagée pour favoriser l’installation en cas de fin de printemps très sec. Une fois installé, les études ont montré qu’une irrigation permet de maximiser les rendements.[2][5]
- Maladies et ravageurs : Le switchgrass semble peu sensible aux maladies et ravageurs. Quelques cas de rouille brune sur des parcelles fertilisées ont été vus mais sans conséquence.
- Récolte [7]: Au printemps (février/mars) ou à l'automne. Rendement potentiel : 5 à 15 t MS/ha. Deux techniques de récolte :
- Fauchage et pressage : Un peu plus coûteux mais facile à stocker.
- Ensilage : Densité très faible (120 - 150 kg/m3) besoin d'un grand espace de stockage vrac.
- Attention : Pas de pâturage ou fauchage plus ras que 15 cm en période de végétation.
- Stockage : Pour garder la matière saine, il est préconisé d'avoir un taux d'humidité inférieur à 15%. Au delà de ce taux d'humidité le stock peut chauffer entraînant une dégradation de la qualité.
- Destruction pour remise en culture de la parcelle [8]:
- Mi-juin : Récolter ou broyer la biomasse aérienne afin d'épuiser les réserves du rhizome, qui sont à leur plus faible à ce moment.
- Dès le redémarrage des rhizomes : Passage de rotavator pour détruire les repousses et fractionner le rhizome. Le switchgrass est plus sensible que le miscanthus à la destruction mécanique, il y donc peu de repousses après. L’utilisation d’un désherbant total, en lieu et place du passage de rotavator, a donné des résultats équivalents.
- Fin juillet/août : En cas de nouvelles repousses 1 à 2 passages de chisel afin de remonter les fragments de rhizomes à la surface du sol.
- Automne : Peu de repousses sont généralement observées. Un semis de céréales pourra alors s'envisager après un léger nivellement à l'aide de disques et en utilisant un semoir direct.
Coût
Les charges ci-après sont calculées à partir d’itinéraires techniques type, en amortissant le coût d’implantation sur la durée de la culture (15 ans), ainsi que le coût de remise en état de la parcelle. Les frais de récolte en fin d’hiver (en balles haute densité) sont pris en compte à partir de la 2ème année ainsi que le manque à gagner (non récolte) de la 1ère et de la dernière année.
- Charges opérationnelles (semences (27 à 45€/kg selon les sources), engrais, protection phytosanitaire) : 1500€/ha soit environ 100€/ha/an sur 15 ans.
- Charges spécifiques (travaux réalisés par entreprise) : 143 €/ha[5].
Pour aller plus loin
- L’implantation du Switchgrass - RMT Biomasse.
- Le désherbage du miscanthus et du switchgrass - RMT Biomasse.
- Switchgrass Establishment Can Ameliorate Soil Properties of the Abandoned Cropland in Northern China
Sources
- ↑ Fiche culture Switchgrass - RMT Biomasse.
- ↑ 2,0 2,1 et 2,2 Biomasse pour l’énergie. Colloque final du programme REGIX, 2010.
- ↑ 3,0 et 3,1 Fiche culture Switchgrass. Programme LIDEA, 2007.
- ↑ https://www.seedenergies.fr/switchgrass/declaration-pac
- ↑ 5,0 5,1 5,2 et 5,3 LIGNOGUIDE - guide d’aide au choix des cultures lignocellulosiques. CASDAR, 2013.
- ↑ Semis du Switchgrass - Seedenergies.
- ↑ Récolte du Switchgrass - Seedenergies.
- ↑ Destruction du switchgrass - Seedenergies.
- ↑ https://www.fdc80.com/medias/files/7-fiche-technique-switchgrass.pdf
Annexes