Appi-N, maîtriser sa fertilisation azotée

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Une pince de test

Appi-N[1] est une méthode de pilotage de la fertilisation azotée sur blé tendre d'hiver développée par l’INRAe pour suivre avec plus de précision les besoins de la plante et ses capacités d'assimilation. En bref, elle permet une réduction des quantités utilisées, un retardement du premier apports (environ de 20 jours) et une réduction des pertes (sol et air).

Principe

La méthode de pilotage de l’azote se base sur l’état de nutrition de la plante (indice de nutrition azoté : INN), calculé à partir de l’indice de chlorophylle. Cette méthode permet d’établir le besoin et les doses en tenant compte :

  • Des carences acceptables : stades de carence qui n’impactent pas le rendement final, notamment en début de cycle et qui peuvent même être bénéfiques.
  • De son coefficient d’utilisation de l’azote : lié à sa vitesse de croissance.
  • Des conditions météorologiques propices à son assimilation. Ainsi on évite de faire des apports en temps trop sec.

Cette méthode, contrairement à la méthode du bilan qui vise une nutrition azotée non limitante, permet de réduire les quantités d’azote utilisées. Ainsi on réduit les problèmes d'accumulation du nitrate dans le sol, on réduit les pertes dans les l'air, on réduit les émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) par la réduction de la production des engrais et on réduit les coûts d’intrants.

Limites de la méthode du bilan

Comparaison entre la trajectoire de la méthode bilan et Appi-N

La méthode du bilan est la méthode généralisée qui est aujourd’hui utilisée pour déterminer la fertilisation azotée d’une culture. Elle se calcule selon le reliquat en sortie d’hiver et les rendements espérés. Le pilotage est déterminé en amont, c’est un calcul prévisionnel et les apports se font selon les stades de développement de la plante.

Pour la méthode Appi-N, le pilotage est calculé tout au long du cycle, selon l’état actuel de nutrition de la plante, sa vitesse de croissance et donc ses besoins.

Les limites avec la méthode du bilan sont :

  • Les apports se font selon une production planifiée mais non assurée.
  • Son calcul se base sur une analyse du sol, le reliquat en sortie d’hiver, qui est une donnée qui pour les agriculteurs et conseillers ne paraît pas toujours très fiable.
  • Que les apports se font selon les stades de développement de la plante et non selon les périodes où les besoins sont plus importants (au moment où la plante croît le plus vite). En général, les apports sont faits trop tôt.

Quelle utilisation

  • L’INRAe certifie ses préconisations seulement pour la culture de blé tendre d’hiver. La méthode devrait se généraliser pour la culture de colza, une fois les essais terminés.
  • Un autre acteur, Yara, qui a développé son propre outil de mesure[2] et son app mobile, a développé la méthode pour la culture du blé tendre, du blé dur, de l'orge d'hiver et de printemps, de la pomme de terre et du maïs. Yara est également un vendeur d’engrais.
  • De façon empirique, certains agriculteurs utilisent la méthode sur d’autres cultures, ils n’ont pas de doses recommandées mais l’outil permet de connaître l’état de nutrition de la plante.
  • L’outil peut aussi être utilisé comme un outil de diagnostic pour comparer l'impact des couverts ou le travail du sol sur la fertilisation.

Le matériel

Exemple d'abaque

Trois éléments sont nécessaires :

  • L’outil de mesure qui permet de mesurer l’indice de chlorophylle de la plante.
  • Une bande sur-fertilisée qui permet (avec l’application) de déterminer un ratio : valeur parcelle/relevé valeur étalon, qui permet d’estimer la valeur de l’INN avec une meilleure précision (limite le risque de surestimation de l'INN).
  • Un abaque ou une application pour retranscrire cette donnée en besoins. A cette étape l’utilisateur obtient une préconisation d’apport.

Outils de mesure

  • N-tester (Yara)
    HydroN-Tester® (HNT)[3], de YARA : Gratuit[4] pour l’instant (11/04/2024) avec la notice[5]. Il ne dispose pas d'écran et doit se coupler à l'application de Yara, Atfarm.
  • SPAD-502Plus
    SPAD-502Plus[6], de chez Konica Minolta : environ 1 500€ et la notice[7]. Avec son écran, on peut l'utiliser avec l'application de l'INRAe.

Application

L'application développée par l’INRAe (lien) est compatible avec les outils HNT (avant l'outil avait un écran) et SPAD-502Plus. On peut ajouter l’icône sur l’écran d’accueil du téléphone pour la retrouver rapidement.

Zone sur-fertilisée

Cette zone, non obligatoire, est fortement recommandée pour réduire la marge d’erreur : elle permet d’avoir deux données (plutôt qu’une et permet d'obtenir un ratio) pour déterminer les besoins de la plante. A chaque mesure sur la parcelle, vous pouvez aussi comparer avec la parcelle sur-fertilisée pour suivre les différences de nutrition.

  • Dimension : Il suffit d’un carré d’1 m/1 m, au milieu de la parcelle de préférence.
  • Date du premier apport : Réaliser la première dose assez tôt, dès la sortie d'hiver, vers le 15 février.
  • Doses : Ajouter 50 UN de plus, toutes les 3 semaines, jusqu’à la floraison, en tenant compte des jours favorables (ne pas hésiter à arroser si les conditions sont trop sèches). Attention à ne pas trop sur-fertiliser pour ne pas créer de la verse.

Le mode d’emploi

  1. Identification d’un jour favorable à l’assimilation de l’azote. L’espacement entre deux apports doit être de 15 jours mais on peut faire des mesures toutes les semaines. Réaliser les mesures jusqu’au stade de floraison. Les conditions favorables pour les apports sont : un sol humide ou une pluie > 5 mm prévue dans les 3 jours.
  2. Appi-N.jpg
    Mesure de la chlorophylle : La mesure est rapide et facile sans endommager la plante, il suffit de pincer la dernière feuille entièrement déployée sur le maître brin. Réaliser 30 mesures pour prendre en compte l'homogénéité de la parcelle et 30 mesures sur l’étalon sur-fertilisé. En cas de pluie ou de rosée, veiller à essuyer l’eau sur la feuille. La mesure est la même avec les deux outils.
  3. L’application de l’INRAe : En fonction des mesures et de l’abaque de la région, l’application va calculer directement l’INN (indice de nutrition azoté) et donner des préconisations de doses avec des conseils. L’application fonctionne avec les deux outils présentés, sans différence de résultats. Autre application : Si on utilise l'outil de Yara, on peut également utiliser l'application Atfarm[8].
Application et préconisations (INRAe)

Avantages

  • Diminuer la pollution des sols et des eaux par les nitrates.
  • Faciliter l’estimation des besoins.
  • Mieux valoriser les apports.
  • Réduire les effets des reliquats en sortie d’hiver.
  • Cette méthode pourrait peut-être conduire au Label Bas Carbone.

Limites

  • Temps : Besoin de mesures régulières.
  • Nécessité de surfertiliser une bande, dite “étalon”.
  • En cas de stress, la mesure peut être faussée.
  • L’outil mesure la chlorophylle et non la teneur en azote donc s’il y a une autre carence (qui rend la feuille jaune), la mesure sera faussée.
  • La méthode n’a pas encore été validée en zone vulnérable.

Les changements par rapport à la méthode du bilan

  • Dose totale : Les doses ne sont pas calculées selon les moyennes nationales ou selon le rendement espéré, ni sur le reliquat en sortie d’hiver.
  • Retarder les apports pour maximiser l’efficience de l’engrais (CAU : Coefficient d’utilisation de l'azote). L’utilisation de l’azote est liée à la vitesse de croissance de la plante et à la météo (pluie après l’apport). Il faut pouvoir changer ses références et accepter le jaunissement des feuilles.
  • Accepter des stades de carence : il y a des carences non préjudiciables pour le rendement et le taux de protéines. Si l’INN est inférieur à 1, la carence n’est pas limitante à la croissance de la plante. Si l’INN est supérieur à 1 : l’azote n’est plus valorisé. Le seuil est la limite sous laquelle il ne faut pas descendre.
  • Réaliser les apports uniquement lors de “jours favorables” c’est-à-dire lorsque les conditions d’humidité du sol sont satisfaisantes pour permettre la valorisation de l’azote (10 mm de pluie dans les 3 jours suivant l’apport ou si le sol est humide).
  • Nécessite un suivi régulier de l’INN et ne pas l’arrêter trop tôt : les derniers stades impactent fortement le rendement et le taux de protéine.
  • Avoir une bande sur-fertilisée pour calculer les besoins.

Bilan

Pour mesurer l'impact de cette méthode, des essais ont été réalisés pendant 3 ans sur des micros parcelles expérimentales et en bande chez des agriculteurs.

  • Date de premier apport : Retardée d’environ 20 jours.
  • Rendement : Équivalent.
  • Taux de protéine : Équivalent.
  • Dose : Diminution de la dose totale appliquée de 23 UN/ha en moyenne.
  • Moins de pertes d’azote : En moyenne, les pertes sont inférieures de 16 kg/ha par rapport à la méthode sans AppiN.
  • Une réduction d’adventices, de maladies et de verse a également été constaté, ce qui permet aussi de réduire les maladies et les apports de régulateurs de croissance.
  • Moins de passage : 2 à 3 apports en moyenne contre 3 à 4 pour la méthode du bilan.
  • Émission de GES : Diminution de 29%. Intérêt pour le Label Bas Carbone.


Annexes

Cette technique s'applique aux cultures suivantes

Sources

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