Pratiquer l’enherbement spontané ou semé de l’inter-rang en vigne

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L’enherbement spontané ou semé de l’inter-rang en vigne consiste à entretenir ou semer un couvert végétal permanent ou temporaire entre les rangs de vigne non pour être récolté mais pour rendre des services écosystémiques.

Bénéfices

  • Cette technique permet en premier lieu d’améliorer la fertilité physique et biologique du sol par action mécanique en limitant les phénomènes d’érosion hydrique et éolienne, de ruissellement et de transfert des éléments chimiques vers les nappes d’eau souterraines.
  • Il joue aussi un rôle important dans le maintien de la faune du sol, favorise les auxiliaires, diminue les populations de ravageurs et les risques de maladies.
  • L’enherbement semé permet de diminuer l’abondance de la flore adventice nuisible ou de modifier les communautés présentes sur la parcelle. Cette technique permet donc de limiter le recours aux herbicides.
  • L’enherbement temporaire est le plus souvent retrouvé sous le nom d’« engrais vert » et permet de fertiliser la vigne.

Conditions de réussites

L’idéal pour les vignerons est de laisser se développer la flore spontanée, riche en diversité, adaptée au terroir et qui ne nécessite pas de semis. Le degré de couverture du sol de 50% est avancé comme étant efficace pour améliorer l'infiltration de l’eau et réduire le ruissellement (Andrieux, 2015). Toutefois, une biomasse trop importante peut accroitre le risque de gel.

Le semis est recommandé lorsque l’enherbement naturel ne permet pas de satisfaire les objectifs recherchés par le producteur tels que la maîtrise d’espèces indésirables ou encore l’augmentation du taux de matière organique.

Précision sur la technique

Choix des espèces

  • Dans le cas de l'enherbement semé, le choix des espèces est à raisonner en fonction de la situation pédoclimatique et du comportement attendu du couvert (concurrence, pérennité, résistance à la sécheresse). Les mélanges sont plus intéressants que les semis mono-espèces car ils permettent d'augmenter la probabilité d’implantation d’au moins une partie des plantes semées et permettent au couvert de cumuler les services.
  • Dans le cas de l’enherbement semé permanent, il faut implanter des espèces pluriannuelles, de 3-4 ans dans l’idéal, afin de garantir le maintien du couvert pendant plusieurs années.

L'enherbement peut donc être spontané ou semé avec des espèces annuelles ou pérennes selon les objectifs recherchés (tableau 1). Les types d'enherbements peuvent être alternés.

Tableau 1 : Espèces adaptées au type d’enherbement choisi et au service recherché.
Exemple d'espèces pouvant être implantées dans un enherbement semé permanent Exemples d'espèces pouvant être implantées dans un enherbement semé temporaire Services rendus par les familles de plantes
Graminées Fétuque rouge demi-traçante, ray grass anglais, fétuque ovine, fétuque des près, ray grass italien, pâturin des prés Orge, avoine, seigle, triticale, ... Améliorer la structure du sol en surface grâce à leurs systèmes racinaires fasciculés denses et puissants.

Limiter le lessivage des éléments fertilisants.

Lutter contre la flore adventice avec les espèces qui ont un fort pouvoir couvrant.

Légumineuses Trèfle violet, sainfoin, trèfle d'Alexandrie, trèfle de perse, trèfle souterrain, trèfle blanc nain type huia, minette, lotier corniculé Féverole, vesce commune, fenugrec Améliorer la structure du sol en profondeur avec les espèces qui ont des systèmes racinaires pivotants.

Les exsudats libérés par les racines jouent un rôle important dans les interactions plantes-microorganismes qui favorisent l'activité biologique des sols.

Capter l'azote atmosphérique → enrichissent le sol en azote.

Crucifères Navette fourragère, moutarde blanche, colza fourrager, ... Améliorer la structure du sol en profondeur grâce au système racinaires pivotants.

Les exsudats libérés par les racines jouent un rôle important dans les interactions plantes-microorganismes qui favorisent l'activité biologique des sols.

Mobilisent le soufre et la potasse et les mettent à disposition en surface, améliorent l'assimilation des éléments nutritifs, bons pièges à nitrates.

Des exemples d’espèces et doses de semis d’enherbements permanents et temporaires adaptés au type de sol et au climat sont disponibles page 38 du dossier d’Agrobioperigord.

Implantation

  • L'enherbement est mis en place sur vigne implantée ou à son implantation. L’anticipation dès l’implantation du vignoble de la présence d’un enherbement par le choix d’un matériel végétal vigoureux permet de se donner des marges de manœuvre par la suite mais cela reste une prise de risque par rapport à la contrainte hydrique que peut engendrer le couvert, alors que le système racinaire de la vigne n'est pas établi.
  • La préparation du lit de semences se fait avec un outil à dent pour décompacter les premiers centimètres du sol, combiné à un outil rotatif permettant de briser les mottes et de niveler la surface du sol.
  • Les semis se font généralement en automne, après les vendanges, à une profondeur de 1-2 cm pour les enherbements permanents et de 2-4 cm pour les enherbements temporaires en mélanges. Un semis au printemps est aussi envisageable mais l’implantation sera plus difficile.
  • Il est possible d’utiliser un outil de semis direct ou un semoir combiné avec un cultipacker.
  • Préférer les semis à la volée aux semis en lignes.
  • Le roulage après le semis permet aux graines d’avoir un bon contact avec le sol et ainsi d’augmenter les chances de germination. Il est conseillé d’augmenter les densités si le roulage n’est pas possible.

Fertilisation/irrigation

  • En règle générale, aucun apport de fumure n’est à prévoir. Toutefois, un amendement organique peut être envisagé avant l’implantation de l’enherbement sur parcelle « maigre ».
  • Un apport azoté peut être fait par un apport au sol localisé sous le rang de vigne ou par voie foliaire entre le stade floraison et fermeture de la grappe en cas de concurrence azotée excessive, pour éviter une vigueur supplémentaire du couvert.
  • Les légumineuses, dans les couverts temporaires, n’entrent pas en concurrence pour l’azote avec la vigne.
  • L’irrigation du couvert végétal peut être envisagée au semis.

Gestion/destruction

  • L’enherbement permanent est géré environ 2 fois par an par tontes. Contrairement aux idées reçues, il faut laisser épier au moins une fois dans la saison les plantes du couvert afin qu’elles fassent leur cycle (plantes annuelles) et deviennent moins concurrentielles pour la vigne.
  • Des fauches assez fréquentes les premières années permettent d’assurer une bonne couverture du sol.
  • Les préconisations de renouvellement du gazon sont de 5 ans mais peuvent être repoussées à 8-10 ans selon son état de propreté.
  • L’enherbement temporaire est détruit au printemps. Le mode de destruction dépendra du service final recherché. Afin de :
    • Lutter contre l’érosion, laisser un mulch en surface de préférence par broyage ou fauchage. Le roulage est aussi possible. La fauche du couvert va aussi permettre un apport de matière organique fraiche au sol qui sera décomposée par l’activité biologique et la faune du sol.
    • Maîtriser les adventices, broyer le couvert avec déport sous le rang.
  • L’enherbement peut être détruit temporairement en cas de forte sécheresse. Un désherbage mécanique ou thermique peut être réalisé sur le rang. Ce dernier est possible dans les régions n’étant pas à risque pour les incendies.
  • Des témoignages de vignerons existent sur l’implantation d’enherbement permanents et temporaires.

Points de vigilance

  • L’enherbement peut être préjudiciable et engendrer une concurrence pour les ressources hydro-azotées avec la vigne dans certains contextes de production et certaines conditions pédoclimatiques. Dès lors, il est conseillé de diminuer la surface enherbée c’est-à-dire le nombre d’inter-rangs (1/2 ou 1/3) et la largeur de la bande. Les couverts temporaires et permanents peuvent être alternés sur la parcelle.
  • La concurrence du couvert peut entrainer une diminution de la vigueur et du rendement de la vigne. Il faut donc adapter sa stratégie d’implantation et raisonner l’enherbement en fonction de ces paramètres.
  • L’enherbement accroît les risques de gelées printanières en cas de conduite basse de la vigne par la création d’un microclimat humide au voisinage des bourgeons. Le couvert doit être maintenu ras pendant la période à risque. Cet effet est négligeable lorsque les bourgeons sont à plus de 30cm du couvert végétal[1]. Le risque est aussi observable en bas de coteaux.
  • Il est déconseillé d’enherber les jeunes vignes de moins de 4 ans en raison d’une concurrence hydro-azotée trop élevée[2].

Quelques actions, projets, programmes

Le GIEE « Les enherbeurs », « Les couvreurs de vigne » et « Vignes en association » en Occitanie travaillent sur ces modalités d’implantation de couverts végétaux dans l’inter-rang de vignes.

Outils d’aide à la décision

Un guide GARANCE (Guide d’Aide à la Reconnaissance des Adventices de Nouvelle-Aquitaine et Conseils pour la gestion de l’Enherbement) existe afin de distinguer les adventices invasives en parcelles viticoles de celles à protéger.

Sources

Annexes


  1. ATV49, 2020
  2. Chantelot, 2003
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