Semer un colza associé

De Triple Performance
Aller à :navigation, rechercher
Colza associé à de la féverole. Crédit photo : CA Meuse


On parle de plus en plus de « colza associé », en particulier dans les pratiques d’agriculture de conservation. La technique consiste à associer un couvert au colza dès l’implantation de la culture. Ce couvert reste en place à l’automne et est détruit pendant l’hiver. La mise en place d’un couvert a plusieurs intérêts par rapport à des enjeux liés à l'azote, les ravageurs et les adventices.

Principe

Associer le colza à d'autres cultures permet de maintenir voire d'augmenter les rendements du colza, tout en réduisant les besoins en fertilisation azotée et en désherbage. Cette association colza-légumineuse est adaptée aux situations à faible disponibilité en azote, dans l’ouest et le centre de la France en particulier. L'intérêt est plus limité lorsque la disponibilité en azote au semis est forte (apports de fertilisants organiques, précédents protéagineux, reliquats post-récolte élevés,...).


Objectifs

Restitution d’azote pour le colza

Le couvert détruit pendant l’hiver (en particulier s’il contient des légumineuses) va restituer au sol de la matière organique et de l’azote dont le colza pourra bénéficier au printemps. Un couvert bien implanté pourra restituer en moyenne entre 20 à 30 kg d’azote disponible pour le colza.

Couverture du sol

  • La mise en place d’un couvert associé au colza favorise encore plus l’absorption de l’azote à l’automne et participe à la diminution des risques de lessivage de l’azote.
  • Un couvert bien développé permet de concurrencer les adventices (ex: la lentille).

Effet structurant

Le couvert associé peut agir sur la structure du sol et l’améliorer, ce qui peut favoriser le développement racinaire du colza.

Perturbe les attaques des ravageurs d’automne

Les colzas associés à des mélanges à base de vesce ou féverole semblent moins attractifs pour le charançon du bourgeon terminal et l'altise du colza.

Le choix du couvert

Colza associé à un mélange de féverole, lin et lentille. Crédit photo : CA Meuse

Le choix du couvert associé doit se réfléchir selon 4 principaux critères :

  • Un couvert à base de légumineuses pour capter l’azote de l’air.
  • Un couvert qui ne concurrence pas le colza.
  • Un couvert qui résiste aux herbicides colza.
  • Un couvert gélif en hiver.


Jouer sur la complémentarité des bénéfices des couverts : enracinement complémentaire au colza pour améliorer son exploration du sol, bonne capacité de stockage d’azote à l’automne puis de libération de celui-ci au printemps, couverture du sol pour concurrencer les mauvaises herbes et rechercher une hauteur de végétation suffisamment importante pour perturber les insectes.

De manière générale, il faut éviter les crucifères comme la navette et le couvert associé le plus facile à réussir est la féverole.


Pour vous aider dans votre choix, l'INRAe a développé l'outil d'aide à la décision CAPS (Colza Associé à des Plantes de Service), vous pouvez le télécharger en suivant ce lien.

Les associations possibles

Lentille

Lentille
  • Avantages :
    • Croissance rapide.
    • Hauteur limitée.
    • Enracinement superficiel.
    • Bon pouvoir concurrentiel avec les adventices.
    • Minéralisation de l'azote au printemps.
  • Inconvénients :
    • Sensibilité au gel : - 7° C.
    • Sensible à l’aphanomyces.
    • Espèce hôte du sclérotinia.
    • Mauvaise sélectivité au désherbage chimique.
  • Dose de semis en association / Objectif nb plantes/m² : 25 à 30 kg/ha. Objectif 100 à 130 plantes/m².
  • Coût indicatif : 50 à 60 €/ha.

Féverole de printemps

Féverole
  • Avantages :
    • Rapidité de développement.
    • Enracinement très performant, structure le sol, améliore la circulation de l'eau.
    • Production de biomasse.
    • Restitution d’azote.
    • Utiliser les semences de ferme.
    • Sensibilité au gel.
    • Bonne sélectivité au désherbage chimique.
    • Perturbe les insectes à l'automne.
  • Inconvénients :
    • Sensible aux conditions sèches.
    • Grosses graines : mélange délicat avec le colza.
    • Coût de la semence.
    • Espèce hôte du sclérotinia.
    • Mauvaise couverture du sol.
  • Dose de semis en association / Objectif nb plantes/m² : 80 à 100 kg/ha. Objectif 10 à 15 plantes/m².
  • Coût indicatif : 20 à 25 €/ha (semences autoproduites).

Trèfle d’Alexandrie

Trèfle d'Alexandrie monocoupe précoce
  • Avantages :
    • Plante annuelle.
    • Facile à détruire.
    • Concurrent vis à vis des adventices.
    • Minéralisation de l'azote au printemps.
    • Restructuration du sol grâce à son système racinaire fasciculé pivotant.
    • Bonne sélectivité au désherbage chimique.
  • Inconvénients :
    • Pouvoir couvrant moyen
    • Sensibilité à la sécheresse
    • Espèce hôte du sclérotinia.
  • Dose de semis en association / Objectif nb plantes/m² : 6 kg/ha. Objectif 200 à 300 plantes/m².
  • Coût indicatif : 15 €/ha.

Trèfle blanc nain

Trèfle blanc nain
  • Avantages :
    • Rapidité de développement.
    • Bonne couverture du sol.
    • Bonne sélectivité au désherbage chimique.
  • Inconvénients :
    • Peu sensible au gel.
  • Dose de semis (kg/ha) si espèce seule : 4-5.
  • Coût €/ha : 30 €/ha.

Le trèfle blanc se développe très peu à l’automne et apporte donc peu de bénéfices au colza. Peu sensible au gel, sa croissance débute au printemps. Cette spécificité fait qu’il peut être ajouté dans un mélange de légumineuses gélives dans le but de se développer rapidement pendant l’interculture suivante, voire de servir de couvert permanent qui restera en place dans les cultures suivantes. Pour limiter les risques de compétition du colza au printemps, il est impératif de choisir des variétés naines comme Aberace. Dans les systèmes avec couverture semi-permanente il est conseillé de semer le couvert en même temps que le colza plutôt que de semer un colza dans le couvert déjà en place (risque accru sur la compétition en eau). Attention tout de même à la profondeur de semis du trèfle blanc, celui-ci doit être positionné superficiellement.

Pois de printemps

Pois fourrager de printemps
  • Avantages :
    • Rapidité de développement.
    • Bonne couverture du sol.
    • Sensible au gel.
  • Inconvénients :
    • Coût de la semence.
    • Sélectivité moyenne au désherbage chimique.
  • Dose de semis (kg/ha) si espèce seule : 50-80.
  • Coût indicatif : 15 €/ha (semences fermières).

Lin de printemps

Lin de printemps
  • Avantages :
    • Sensible au gel.
    • Bonne sélectivité au désherbage chimique.
  • Dose de semis (kg/ha) si espèce seule : 1.
  • Coût indicatif : 1,3 €/ha.

Mélanges triples ou plus

  • Avantages :
    • Bonne complémentarité entre les espèces.
    • Pour certains mélanges, graines de taille similaire mélangeables avec le colza directement.
  • Inconvénients :
    • Certaines espèces peuvent prendre le dessus par rapport à d’autres
    • Attention à la difficulté de destruction par le gel pour des espèces comme les vesces ou les gesses.
    • Coût de la semence.
  • Coût indicatif : 40-80 €/ha.

L’association de plusieurs légumineuses est intéressante pour multiplier les atouts et contrebalancer les défauts de l’une d’entre elles. Les plantes à port dressé plus tardive avec pivot (féverole) peuvent être associées à des plantes à port plus étalées, avec racines fasciculées et souvent plus précoces (lentille, trèfle d’Alexandrie, etc.).


Exemple de mélanges fréquemment associés avec le colza :

  • Féverole + Vesce + Trèfle d’Alexandrie
  • Gesse + Fenugrec + Lentille (mélange recommandé en secteur peu gélif)
  • Féverole + Lentille
  • Gesse + Lentille + Trèfle d’Alexandrie (mélange recommandé en secteur peu gélif)


Attention : La vesce n'est pas assez gélive, la gesse est peu couvrante et n’apporte rien de plus et le fenugrec est peu couvrant et n’apporte rien de plus si ce n’est un répulsif contre les lièvres.


A retenir :

  • Pour lutter contre les campagnols : 2kg de mélilot en mélange avec le couvert.
  • Répulsif contre les lièvres : 10 à 20kg de fenugrec en mélange avec le couvert.


Pour avoir plus d'infos sur les associations possibles, consultez l'outil CAPS.

L'implantation

La différence de taille entre les graines du colza et celles du couvert implanté peut être difficile à gérer au semis. Plusieurs méthodes existent selon la nature du couvert associé et le matériel.


Type de semis Type de graines Espèces

possibles

Semis avec le même

semoir avec 2 cuves

Tout type Toutes

espèces

Semis du couvert associé

à la volée (puis enfouissement

avec semoir ou outil)

  • Densité <30kg/ha au Delimbe
  • Eviter les trop petites graines

(largeur d’épandage trop faible)


Lentille,

féverole

Semis avec le même

semoir en mélange

avec le colza

Petites graines Lentille,

trèfle,

lin

Semis sur le rang

au microgranulateur

Densité <30kg/ha Lentille,

trèfle,

lin

Attention : Si les cultures associées sont semées trop tôt, il y a possibilité d’avoir un développement trop important du couvert qui risque d’étouffer le colza.

Conseils d’implantation / Adaptation de la conduite

Carte des semis de colza associé éditée par Terres Inovia.
  • Réaliser des semis précoces, entre le 15 et 20 août (5 jours avant la date de semis normale du colza seul), pour favoriser la croissance des plantes compagnes et augmenter leur sensibilité au gel lors de l’arrivée des premiers froids. A l’inverse, un semis tardif ne permettra qu’un faible développement des plantes compagnes et ne justifiera pas le coût supplémentaire des semences.
  • Choisir une variété peu sensible à l’élongation.
  • Implanter en simultané et en mélange avec la semence pour les graines de même densité que le colza (ex : colza + lentille). Cela économise un passage si le matériel le permet.
  • Implantation en deux passages pour les graines de densité différente du colza, semer le couvert avant le colza. Ne pas attendre trop longtemps entre les deux semis pour ne pas détruire le couvert et éviter que l’association ne prenne le dessus sur le colza. Pour une question de temps, un semis à la volée sera le plus avantageux.
  • Choisir une parcelle propre en dicotylédones, notamment géranium. La stratégie herbicide devra être adaptée et se limitera à un passage précoce ou deux pour limiter la phytotoxicité sur les plantes compagnes (voir ci-après « Adapter le programme herbicide »).
  • La fertilisation azotée au printemps pourra être réduite, en général de 30 unités. L’ensemble de ces adaptations de conduite garantissent le succès de la pratique et viennent justifier le surcoût de semence des plantes compagnes.


Gestion des adventices

La phytotoxicité des herbicides colza peut nuire assez fortement au couvert associé, voire le détruire. Il faut être vigilant sur les produits et les doses de traitement appliqués.

La réduction des herbicides couplée à la présence d’un couvert associé peut permettre d’obtenir des parcelles propres avec des programmes de désherbage moins chargés.

Les antigraminées

  • Rattrapage en post-levée : même raisonnement que pour le colza seul, sur repousses de graminées avec un antigraminées foliaire.
  • Rattrapage d’entrée ou sortie hiver : avec un produit racinaire.

Les antidicotylédones

  • Les doses et stades d’application des produits diffèrent d’un colza seul. Les applications de pré-semis sont déconseillées et celles de pré-levées sont à éviter si possible car elles sont moins sélectives que les applications de post-levée.
  • Privilégier des applications au stade rayonnant voire 2 à 4 feuilles du colza. Fractionnez en 2 passages si besoin.


Les principales causes d’échec de la technique des colzas associés sont liées au désherbage : il s’agit de situations avec historique de pression adventices élevée ou avec impasse herbicide. Les causes d’échec peuvent également venir de la concurrence produite, sur le colza, par certains couverts associés de vesces ou trèfles (violet, incarnat, d’Alexandrie) non détruits en sortie hiver.

Association avec des couverts pérennes

L’intérêt pour les couverts permanents est croissant. S’il est risqué d’implanter un colza dans un couvert en place (sol asséché par le couvert), l’implantation simultanée avec le colza est pertinente.


Intérêts

Les légumineuses pérennes (lotier, trèfle blanc, trèfle violet, luzerne, etc.) se développent pas ou peu à l’automne. Elles ne fourniront pas de service au colza. Leur intérêt sera de couvrir le sol et de produire de la biomasse dès la récolte du colza et éventuellement d’apporter différents services à la ou les cultures suivantes.

Points d’attention

  • Choix du couvert : lotier et trèfle blanc sont les espèces qui présentent le moins de risque de concurrence du colza au printemps.
  • Gestion délicate du désherbage : les légumineuses pérennes ne contribuent pas à étouffer les adventices alors qu’une réduction de dose d’herbicides est nécessaire et les rattrapages d’entrée hiver à proscrire pour ne pas les détruire.

Il est donc recommandé :

  • D’éviter les parcelles à forte pression en adventices dicotylédones.
  • D’associer des légumineuses gélives ayant une bonne capacité de couverture du sol précoce : trèfle d’Alexandrie mono-coupe ou lentille.

Pour aller plus loin

Vidéos

Sources


Annexes

Cette technique s'applique aux cultures suivantes

La technique limite la présence des auxiliaires et bioagresseurs suivants


Partager sur :