Semis précoce de colza d’hiver associé et mélange variétal
Didier Manlhiot polyculteur-éleveur dans le Puy de Dôme a entamé une transition dans ses pratiques afin de réduire l’utilisation des insecticides et de mieux contrôler les adventices sur ses parcelles. Il témoigne ici sur les différentes leviers qu'il actionne pour atteindre ses objectifs.
Contexte de l'exploitation
- Nom de l’agriculteur : Didier Manlhiot.
- Nom de l’exploitation : EARL Manlhiot.
- Département : Puy-de-Dôme (63).
- SAU : 105 ha.
- UTH : 1 + MO œuvre castration.
- Élevage : non concerné.
- Cultures remarquables : Colza.
- Irrigation : Irrigation du maïs semences, colza non irrigué.
- Types de sols : argilo calcaires superficiels, argilo-sableux, alluvions.
- Travail du sol : semis simplifiés, semis direct céréales et couverts.
- Succession de cultures :
- Ferme en zone AAC (Aire d'Alimentation de Captage) : Non.
- Autres éléments de contexte : Pluviométrie de 550 mm/an en moyenne, forts contrastes climatiques. Les objectifs de l'agriculteur sont de garantir son revenu, conserver un sol vivant, augmenter le taux de matière organique pour augmenter la RFU (Réserve Facilement Utilisable) et réduire les dépenses en intrants (engrais, phyto).
- La pratique au sein du système de culture : Elle est associée au semis simplifié voir direct, à l’implantation de couverts végétaux et à l’alternance des périodes de semis.
Origine de la pratique et cheminement de l’agriculteur
Les parcelles de l’exploitation craignent l’humidité et le sec, et les sols usent très rapidement le matériel. Didier Manlhiot a cherché à améliorer la structure et la vie de ses sols, tout en réduisant les charges de mécanisation, et en réduisant les intrants. C’est ce qui l’a amené à s’intéresser aux couverts végétaux en interculture et au colza associé. La préservation de la biodiversité fonctionnelle l’a également amené à limiter l’utilisation des insecticides sur l’ensemble de son système de cultures.
La technique
Date de début de mise en œuvre : 2007.
Objectif
- Améliorer la structure et la vie des sols.
- Réduire les charges de mécanisation et d’intrants.
- Lutter contre les insectes d’automne et limiter les dégâts de mélighètes.
- Réduire la pression adventices.
- Implanter un couvert longue durée pour mettre en œuvre les techniques d’agriculture de conservation.
Description
Semis du colza d’hiver avec des plantes compagnes :
- Féverole de printemps : 70 kg/ha.
- Trèfle blanc 2kg/ha + 0,5 kg/ha de trèfle incarnat.
- Lentille – Fenugrec 10 kg/ha.
Part de la variété précoce/variété d’intérêt : 5%.
Itinéraire technique du colza
- Travail du sol : 1 passage de herse à paille Ecomulch (répartir les andains de paille).
- Semis : dès le 05-15 août.
- Molluscicide : selon les conditions météo, biocontrôle systématique.
- Fertilisation : 90 à 120 U N/ha.
- Désherbage : Alabama en fractionné (2x0,5L/ha) + 1 AG foliaire.
- Fongicide : 1 passage si météo pluvieuse à floraison - biocontrôle.
- Insecticide : 1 à 2 passages (charançon de la tige et charançon du bourgeon terminal).
- Récolte : 14 juillet.
- Rendement : 28 q/ha de moyenne sur 5 ans.
Attentes de l’agriculteur
La simplification du travail du sol, l’association du colza avec les plantes compagnes et le semis d’un mélange variétal ont permis à Didier Manlhiot de réduire l’utilisation des insecticides, avec notamment une absence de traitement méligèthes depuis 2015. Le colza étant plus robuste à l’automne, le traitement contre les altises et dans une moindre mesure contre les charançons du bourgeon terminal ne sont pas systématiques : la décision de traitement est prise à la parcelle selon les observations réalisées.
L’objectif n’est pas l’absence totale de symptômes, ceux-ci sont acceptés tant que la marge de la culture n’est pas atteinte.
Mise en œuvre et conditions de réussite
Le semis du colza associé doit être réalisé tôt pour conserver l’humidité du sol, profiter d’éventuels orages estivaux et assurer une levée rapide du colza et du couvert.
La part de la variété précoce par rapport à la variété d’intérêt est de 5%. La variété précoce, en fleurissant plus tôt, attirera les méligèthes, réduisant les attaques sur les boutons de la variété d’intérêt.
Les couverts retenus permettent de rendre différents services : féverole de printemps pour perturber les insectes, lentille pour la gestion du salissement et trèfle blanc pour l’interculture suivante.
Le délai de retour dans la rotation est de 5-6 ans, avec alternance de cultures d’automne et de printemps pour une meilleure gestion des adventices.
"Dès la moisson, j’utilise une herse Ecomulch pour déchaumer très superficiellement, quitte à laisser les pailles. Il faut être prêt à semer autour du 5-10/08. Pour les plantes compagnes, j’ai essayé plusieurs combinaisons et finalement j’ai choisi différentes espèces : la féverole qui monte en hauteur pour perturber les insectes, la lentille et le trèfle blanc qui sont couvrants, mais d’autres plantes pourraient être testées (lotier, fenugrec, pois chiche, lin…). Les conditions de réussite sont très dépendantes de la météo. Mon itinéraire technique n’est pas figé, il est important de s’adapter aux conditions de l’année, à la parcelle, et de ne rien s’interdire (travail du sol un peu plus profond ou traitement insecticide si besoin)." Didier Manlhiot.
Avantages et limites
Avantages
- Réduction des phytos et préservation des auxiliaires.
- Redistribution de l’azote des couverts.
- Structuration du sol.
- Conservation du trèfle blanc en intercultures.
- Gain de temps (réduction du travail du sol).
Limites
- Concurrence possible par rapport à la culture.
- Gestion du salissement avec un nombre de solutions chimiques limité du fait de la présence de légumineuses.
- Choix de couverts gélifs, mais la destruction est dépendante de la rigueur de l’hiver.
Améliorations et autres usages envisagés
Utiliser le trèfle blanc en couvert d’interculture pour réussir le semis direct du blé suivant et limiter l’apport d’azote grâce à la légumineuse en interculture.
"Pour être efficace, le couvert doit être dense à l’automne. Les semences de plantes compagnes coûtent cher : faire sa semence de ferme est une bonne solution." Didier Manlhiot.
Pour aller plus loin
Bénéfices et conduite du colza associé à des légumineuses - Terre Inovia.
Indicateurs de résultat
| Niveau de satisfaction/
performance |
Commentaires de
l’agriculteur | |
| Maîtrise des adventices | 
|
Amélioration |
| Maîtrise des ravageurs |
|
Amélioration |
| Maîtrise des maladies |
|
Choix variétal important.
Dépendant de l’année |
| IFT de la(les) culture(s)
concernée(s) |
IFT moyen de
2017 à 2019 = 5,6 |
Diminue |
| IFT du système de culture | IFT moyen de
2017 à 2019 = 3,38 |
IFT réf régional = 3,8 |
| Rendement | 28 q/ha | Stable |
| Temps de travail dans la
parcelle |
|
Diminue |
| Temps d’observation | 
|
Augmente |
| Charges de
mécanisation |
|
Diminue |
| Marge Semi-nette
du Système |
|
Stable |
| Prise de risque |
|
Augmente |
Niveau de satisfaction de l’agriculteur :
Non satisfait Moyennement satisfait Satisfait
Ce que retient l’agriculteur
"Le colza associé est une des techniques mise en place sur mon exploitation. Il est difficile d’évaluer cette technique seule, il faut évaluer l’ensemble de la conduite du colza, voir plus : il faut ainsi prendre en compte l’utilisation du biocontrôle contre le sclérotinia, le choix variétal et l’ensemble des leviers utilisés dans la rotation."
L’avis de l'ingénieur réseau DEPHY
La conduite du colza associé telle que pratiquée par Didier Manlhiot présente de nombreux avantages. L’implantation en semis direct ou travail très simplifié permet une réduction des charges de mécanisation, du temps de travail et des intrants. La couverture du sol à l’automne par les plantes compagne peut être intéressante pour réduire le salissement et la pression des insectes d’automne, essentiellement des altises. Le semis d’une variété précoce en mélange dans la variété d’intérêt permet quant à elle une impasse du traitement méligèthes.
En contrepartie, cette technique demande de l’adaptabilité. Les itinéraires techniques sont adaptés aux conditions de l’année et à l’état de développement de la culture et des couverts.
Marine MASSON- Chambre d’Agriculture du Puy-de-Dôme. m.masson@puy-de-dome.chambagri.fr
Source
Action du plan Ecophyto piloté par les ministères en charge de l’agriculture, de l’écologie, de la santé et de la recherche, avec l’appui technique et financier de l’Office Français de la Biodiversité.
Leviers évoqués dans ce système
Matériels évoqués dans ce retour d'expérience
Cultures évoquées
Bio-agresseurs évoqués
